Ujjayi pranayama

 

Le souffle victorieux

 

 

 

L’ujjayi pranayama est une des principales respirations du Hatha Yoga. On la pratique à la fois en tant que pur exercice de respiration mais aussi en tant que support de pratiques posturales notamment dans le Yoga Ashtanga de Pattabhi Joïs où elle accompagne toutes les sances de postures statiques et les enchainements dynamiques.

 

 

Selon certains auteurs le terme ujjayi se composerait du préfixe ud s’élever et de jaya qui désigne une forme de salutation. Par extension ujjayi signifierait "ce qui s’exprime à haute voix". Pour d’autres ujjayi signifie "ce qui mène au succès" ou "le victorieux[1]". De fait le ujjayi qualifie un pranayama de sonore et victorieux en ce sens qu’il produit des bénéfices physiques et mentaux pour le pratiquant. Mais ujjayi est avant tout un pranayama c’est-à-dire une technique d’amplification du souffle et selon la tradition du Hatha Yoga une technique d’augmentation de la force vitale La technique du ujjayi est basée sur la constriction de la gorge et la fermeture partielle de l'épiglotte pendant la respiration ce qui limite et régule le débit d’entrée et de sortie de l’air. Cette limitation du débit de l’air provoque une friction de l’air qui génère un bruissement sourd et continu qui s'apparente au bruit du sac et du ressac des vagues sur la plage et sur lequel le pratiquant se concentre.

 

 

La respiration ujjayi a des effets physiologiques bénéfiques: l'augmentation de la capacité respiratoire et l’amélioration des échanges gazeux. Elle entraine aussi la diminution de la respiration au repos.

 

 

Mentalement elle favorise la fixation de l’attention, elle permet une écoute intérieure de qualité et prépare le pratiquant à la méditation dhyana et à l’absorption/l’extase samadhi.

 

 

Selon la Hatha Yoga Pradipika, la respiration ujjayi permet d’augmenter la vitalité et la longévité.

 

 

Pratique d’Ujjayi pranayama 

 

 

Ujjayi pranayama se pratique en position assise de préférence en position siddhasana posture parfaite ou posture de l'adepte ou du demi-lotus. Les bras sont tendus, dos de la main sur les genoux, bassin basculé vers l’avant, lombaires légèrement creusées, colonne vertébrale redressée et épaules maintenues basses. Pour prendre cette posture on abaisse légèrement la tête en étirant la nuque.

 

 

Avant de démarrer la respiration ujjayi, on commence par porter l’attention sur le passage naturel du souffle dans les narines et pendant quelques repirations on prend bien conscience du mouvement spontané de chaque inspiration et de chaque expiration.

 

 

Pour démarrer la respiration ujjayi proprement dite on concentre son attention sur une légère constriction de la gorge et on respire doucement par le nez. L’inspiration se fait par les deux narines, sangle abdominale contrôlée (c’est à dire que le ventre ne s’avance pas). Pendant l’inspiration la glotte reste partiellement bloquée, l’air produisant le son régulier caractéristique du ujjayi. Mentalement on conduit le souffle de la gorge vers la poitrine que l’on remplit à bloc. Le son du au passage de l'air ne doit pas être forcé ni difficile ni court ni agressif ni superficiel ni rapide mais lent, régulier et doux. En fin d’inspiration on arrête le souffle pendant deux secondes avant d’expirer.

 

 

L’expiration se fait aussi par les deux narines. Elle commence par la contraction de la paroi abdominale puis des muscles thoraciques et l’abaissement des clavicules sans courber le dos.  Mentalement on conduit le souffle de la poitrine vers la gorge. L’expiration s’accompagne du même son uniforme et régulier du ujjayi et peut durer deux fois plus longtemps que l’inspiration. A la fin de l’expiration on bloque le souffle pendant deux secondes avant de reprendre l’inspiration.  

 

 

Pendant toute la durée de l’exercice on fixe l’attention sur le passage de l’air dans les narines et sur le bruissement de l’air au niveau de la glotte.

 

 

On peut pratiquer plusieurs cycles d’une dizaine de respirations chacun, espacés de quelques minutes. Entre deux cycles on peut s’allonger en  savasana posture du mort tout en respirant de façon naturelle.

 

 

 

Pratique de purna ujjayi pranayama

 

 

Purna ujjayi pranayama est une forme plus intense du ujjayi pranayama. Très semblable au ujjayi pranayama simple, purna ujjayi se caractérise par le rajout après la phase d’inspiration d’une phase de rétention à plein kumbaka aussi longue que possible.

 

 

Dans la position assise de départ siddhasana le bras gauche est posée sur le genou comme dans ujjayi pranayama mais le bras droit est replié pour permettre à la main droite de boucher le nez. Comme dans la respiration alternée, on utilise la main droite index et majeur repliés, le pouce pouvant boucher la narine droite, l’annulaire et l’auriculaire la narine gauche.

 

 

L’inspiration se fait avec le ujjayi  par les deux narines, sangle abdominale contrôlée. La rétention s’effectue à plein après l’arrêt de l’inspiration, le nez bouché par les doigts, en plaçant la contraction de la gorge jalandhra bandha et le verrou racine mula bandha.

 

 

L’expiration avec le ujjayi s’effectue par la narine gauche seulement, la narine droite étant fermée par le pouce.  Pendant l’expiration on garde impérativement mula bandha et éventuellement jalandhara bandha. L’expiration est aussi longue et complète que possible. Sa durée est d’au moins le double de celle l’inspiration et pourra aller jusqu’à quatre fois celle de l’inspiration. Il faut néanmoins veiller à ne pas trop allonger rétention et expiration pour que l’inspiration suivante puisse rester bien contrôlée avec un son du ujjayi continu et dans la même tonalité. Si l’inspiration se fait de façon hâtive, cela indique que la rétention et l’expiration ont été trop longues et qu’il faut les réduire.

 

 

Pratique de purna ujjayi pranayama alternée

 

 

Il s’agit dans cet exercice d’alterner un cycle de respiration sonore ujjayi comprenant expiration, rétention à vide, inspiration et rétention à plein avec un cycle de respiration silencieuse comprenant lui aussi expiration, rétention à vide, inspiration et rétention à plein. Mulabandha se place pendant la rétention à plein de quelque secondes suivant chaque inspiration.  Mulabandha doit être maintenu pendant l’expiration suivante et pendant la rétention à vide de quelques secondes. Mulabandha est relâché avant l’inspiration.

 

 

Cette succession de respirations sonores ujjayi et de respirations silencieuses peut se pratiquer pendant au moins dix minutes mais il ne faut jamais forcer le souffle. Purna ujjayi pranayama alternée peut se révéler très fructueuse pour le calme intérieur et la concentration[2].

 

 

 

Ujjayi pendant les asana   

 

 

Dans le Yoga Ashtanga de Pattabhi Joïs la respiration ujjayi accompagne la pratique des postures asana et des transitions dynamiques. Le souffle ne s’arrête à aucun moment. La constriction partielle de la gorge et le bruit caractéristique d’ujjayi sont maintenus pendant toute la séance. Lorsqu’on fléchit vers l’avant le mouvement se synchronise sur une expiration, lorsqu’on se redresse sur une inspiration, lorsque la posture est maintenue l’inspiration et l’expiration s’équilibrent.

 

 

C’est la posture et le mouvement qui suivent le souffle. Le son du souffle fournit un retour qui renseigne sur la qualité de la posture. Comme la posture qui l’accompagne, le son ne doit être ni forcé ni difficile ni court ni agressif ni superficiel ni rapide mais fluide prolongé et agréable. Le rythme de la respiration comme le rythme cardiaque varie au cours de la séance pour s’adapter à l’intensité du mouvement ou de la posture. On ne doit pas lutter contre ces variations de rythme du souffle on doit les accompagner. Dans la posture du cobra bujangasana ou dans les salutations au soleil suryanamaskara, par exemple, à mesure que la pose devient plus intense la respiration s’accélère. Dans la posture du lotus padmassana par contre l’intensité et le débit du souffle se réduisent, la respiration ralentit.

 

La respiration ujjayi peut aussi être pratiquée en marchant ou en courant.

 

 

Les effets d’ujjayi pranayama

 

 

Pendant l’inspiration ujjayi le blocage partiel de la glotte a pour conséquence d’augmenter la dépression intra-pulmonaire ce qui accroit la migration dans l’air du poumon de gaz issus du système veineux. A l’expiration ujjayi le blocage de la glotte augmente la pression intra-pulmonaire ce qui accroit l’expulsion gazeuse hors des poumons, améliore leur élasticité et leur compressibilité et augmente la capacité respiratoire. Ceci permet d’accroitre par l’inspiration la quantité d’oxygène et donc d’énergie fournie au corps pour maintenir la vie des cellules des organismes et des systèmes. Cela permet aussi d’augmenter par l’expiration la quantité de toxines[3] rejetées par l’expiration qu’elles soient d’origine nutritionnelle, environnementale, émotionnelle ou mentale[4]. Ces modifications respiratoires entrainent aussi la réduction de la respiration au repos, une sorte de mode basse consommation au repos.  

 

 

Avec l’amplification de la respiration et la concentration de l’attention sur le bruissement du souffle, la respiration ujjayi favorise la concentration et l’écoute intérieure.  Elle contribue à l’objectif d’apaisement du mental. La respiration ujjayi est donc une technique corporelle de pranayama qui donne une ouverture au pratiquant sur les techniques psychiques du retrait pratyhara, de la fixation dharana, de la méditation dhyana voire de l’absorption/l’extase samadhi.

 



[1] André Van Lysebeth, PRANAYAMA la dynamique du souffle, Flammarion 2017, p. 290.

[2] Boris Tatsky, « INITIATION AU PRANAYAMA »,Yoga Journal, n°  ,2013, p. 36-37.

[3] Une toxine est une substance toxique fabriquée par un organisme vivant tel une bactérie, un champignon, un végétal ou un animal. Les toxines désignent des substances en excès dans le corps qui empêchent le bon fonctionnement de l'organisme et qu'il faut éliminer. https://www.futura-sciences.com/sante/definitions/biologie-toxine-15143/, consulté le 04 septembre 2024

[4] Gregor Maehle, Ashtanga yoga practice & philosophy, first new world library edition, September 2007.

 


On utilise ujjayi pranayama une méthode d'amplification du souffle et donc de déploiement de l'énergie, que l'on associe à des bandha des verrous énergétiques.

 

La pratique du ujjayi nécessite une légère constriction de la gorge par fermeture partielle de l'épiglotte. Ce faisant on régularise le débit d'air ce qui allonge le souffle et on émet un léger son sifflant que l'on écoute pendant toute la pratique. Le son du ujjayi s'apparente au bruit du sac et du ressac des vagues sur la berge. L'écoute du son du ujjayi contribue à pratyhara (l'écoute intérieure). Le son du souffle renseigne sur la qualité de la posture. Il ne doit donc être ni forcé ni difficile ni court ni agressif ni superficiel ni rapide mais fluide prolongé et agréable. En se concentrant sur le son du mouvement e l'air on arrive à calmer profondément le corps et l'esprit ce qui rend réceptif et efficace. La pratique régulière du pranayama ujjayi procure une augmentation de la capacité respiratoire et diminue la quantité de respiration au repos

 

On utilise aussi les bandha des contractions de certains muscles ou verrouillages qui créent des fermetures énergétiques et rendent la pratique plus efficace. Les verrouillages font partie du système de respiration. Ces verrouillages visent à contenir l'énergie à l'intérieur du corps. Ils augmentent le "feu" intérieur et rendent peu à peu le corps plus "brillant" et plus "fort".